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La crise sanitaire met au défi les banques d’accélérer leur transformation numérique tout en préservant l’humain

La crise de la Covid-19 accélère la digitalisation du parcours client déjà bien engagée. Les banques capitalisent notamment sur les apports de l’intelligence artificielle pour offrir davantage de personnalisation.

Les risqués liés à la pandémie de la Covid-19 ont contraint les clients des banques à réduire leurs déplacements en recourant aux canaux digitaux. Le phénomène n’est pas nouveau et les établissements font face à une baisse constante de la fréquentation de leurs agences. Selon le dernier baromètre Deloitte sur « Les Français et les nouveaux services financiers », publié en février, 84 % de nos concitoyens réalisent des opérations bancaires en ligne. 43 % passent même exclusivement par les points de contact numériques.

Le confinement a toutefois fait passer la relation client-banque dans une autre dimension. Du jour au lendemain, les établissements financiers ont massivement basculé dans le télétravail, y compris pour les activités BtoB jusqu’alors réputées inéligibles comme la Banque de financement et d’investissement (BFI), les métiers titres ou la gestion d’actifs.

Le recours généralisé au travail à distance a, par ailleurs, dû être organisé au moment même où les banques devenaient la courroie de transmission entre le Gouvernement et les entreprises avec le prêt garanti par l’Etat. Entre mars et début mars, ce sont 570 000 sociétés, dont 95 % de TPE et PME, qui ont souscrit un PGE, soit autant de dossiers à traiter.

En tout point exceptionnel, la période du confinement a montré par l’exemple que les banques étaient, elles aussi, capables de résilience. Elles ont prouvé leurs capacités d’innovation en dépit des lourdes contraintes réglementaires qui pèsent sur la profession (BCBS 239, Bâle III, MiFID II…) et de la nécessaire protection de leurs systèmes d’information.

De fait, beaucoup d’inhibiteurs à l’innovation ont été balayés par la crise sanitaire. Des décisions longtemps repoussées faute de temps, de compétences internes ou de budget ont été prises au pied du mur. Plus question de tergiverser, la pandémie a mis fin aux atermoiements.

Selon une étude de l’éditeur Twilio, la crise a fait faire en moyenne un bond de 6 ans aux entreprises dans leur stratégie de transformation numérique, et même de 6,7 ans en France. Pour plus de la moitié des entreprises interrogées, la crise a consacré le règne de l’omnicanal afin de garder le lien avec leurs clients. 53 % ont même ajouté de nouveaux canaux durant le confinement.

Par nouveaux canaux, on pense, bien sûr, aux chatbots. Pionnières dans l’utilisation de l’intelligence artificielle pour conseiller les traders des salles de marchés ou lutter contre le blanchiment d’argent et les cas de fraude, les banques ont vu l’intérêt à déployer ces agents conversationnels. Ils offrent une disponibilité 24/7 en complément des canaux traditionnels – courriel, centre d’appel, chat… – tout en gommant un irritant souvent remonté par les clients des banques : le manque de visibilité des offres.

Plutôt que de se perdre dans l’arborescence d’un site, le client est aiguillé par le chatbot vers l’offre la plus pertinente. S’il préfère passer à l’oral pour converser, un callbot répond aux demandes simples mieux que ne le ferait un serveur vocal interactif (SVI) – pas de mots-clés à énoncer, le client s’exprime en langage naturel – tout en déchargeant le centre de contacts.

Le juste équilibre entre digital et humain

Côté back-office, l’IA permet d’« augmenter » les conseillers de clientèle. Des assistants intelligents classent automatiquement les mails entrants selon la nature de la demande et le degré d’urgence puis suggèrent des réponses personnalisées.

Un « robo-advisor » va plus loin en émettant des recommandations en matière de gestion de patrimoine. Ce conseiller financier virtuel se base pour cela sur la situation de l’investisseur et sur profil de risque – approche prudente, équilibrée ou dynamique.

Selon une autre étude du cabinet Deloitte, une majorité de Français est favorable à cette automatisation. 66 % accepteraient que leur conseiller utilise ce type de solution digitale en complément de leurs propres avis et recommandations pour les aider dans la réalisation d’opérations complexes.

Dans le même esprit, l’ouverture de comptes en ligne ou la souscription de contrats « full on line », du dépôt des pièces justificatives à la signature électronique, est appelée à se développer dans le crédit à la consommation et les produits d’assurance « simples ».

Tout l’enjeu pour les banques sera, dans les prochains mois, de doser la part de l’humain et du digital. L’homme reste au centre de la relation banque-client, et les établissements traditionnels pourraient tomber dans le piège de pousser le curseur trop loin. Au risque de gommer la frontière qui sépare les acteurs historiques des néobanques. Pas de réseau physique ni conseillers de clientèle attitrés, le service client de ces dernières se limite parfois à un live chat.

En cela, la crise de la Covid-19 induit des injonctions contradictoires. Les nécessaires mesures de protection sanitaire conduisent à un recours accru à la digitalisation. Dans le même temps, le besoin de lien social n’a jamais été aussi fort et plaide en faveur d’une incarnation de l’expérience client.

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